#ZAN – Saura-t-on évaluer l’artificialisation ?

L’arrêt du Conseil d’Etat du 4 octobre 2023 (n°465341) censure le renvoi à un arrêté du ministre pour définir la surface du « polygone » regardé comme la juste échelle de référence. L’artificialisation est une notion qui a été longtemps plus ressentie que mesurée. Sa transcription réglementaire butte sur la fixation d’une méthode scientifique d’évaluation. En 2011, la feuille de route de la Commission Européenne pour une Europe efficace dans l’utilisation des ressources fixe un objectif de « suppression d’ici à 2050 de toute augmentation nette de la surface de terre occupée ». En 2021, la Loi dite Climat et Résilience transcrit cet objectif à l’article L 101-2-1 du Code de l’urbanisme qui prévoit notamment : « L’artificialisation nette des sols est définie comme le solde de l’artificialisation et de la renaturation des sols constatées sur un périmètre et sur une période donnés ». Entre-temps, à la faveur de dizaines d’articles et de colloques, chacun est venu proposer sa méthode, selon sa culture, sa formation et son expérience.

De la loi au décret et du décret au stylo du ministre, on perçoit l’incapacité à embrasser une notion qui n’a de sens que lorsqu’elle est enracinée sur un territoire non seulement identifié mais encore connu. La référence par le décret du 29 avril 2022 à la figure géométrique du « polygone » -qui est une surface plane qui peut adopter toute forme et toute taille- était déjà un aveu d’impuissance. L’orthodoxie de l’article L 101-2-1 avait été battue en brèche dès la loi du 20 juillet 2023 qui a accordé un droit uniforme de consommation d’un hectare à toute communes. Cette loi renvoyait déjà aux frottements entre la norme et la négociation, quand on sait qu’une « conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols » de cinquante-trois membres pourra connaître des difficultés de mise en œuvre.

Chaque fois que l’on situe un acte par rapport à une situation, on doit réserver la marge d’indétermination. Le décret attaqué suggérait le choix de la détermination d’une « unité de surface » qui serait uniformément appliquée sur le territoire national. C’est comme régler la focale sans faire le point. La densité des retours d’expérience diffusés depuis dix ans sur la façon d’embrasser l’artificialisation frappe par le très fort empirisme dont ces restitutions sont empreintes, rendant difficile toute généralisation. L’évolution probable des textes vers une nomenclature identifiant des seuils de référence entre 50 et 2500 mètres carrés en est l’illustration. La territorialisation des objectifs de réduction de l’artificialisation pourrait encore gagner à permettre qu’à l’échelle régionale, une « boîte à outils » soit validée comme outil d’évaluation, pour tenir compte de la diversité des territoires comme des écosystèmes rencontrés. La décision du Conseil d’Etat du 3 octobre balise ainsi un chemin qui accuse une forte pente jusqu’en 2031.
Guillaume GHAYE

Est illégal le permis valant autorisation d’exploitation commerciale délivré par le maire postérieurement à l’enregistrement d’un recours devant la CNAC – CE, 1ère et 4ème chambres réunies, 2 mars 2022, n° 440079

Le maire de Saint-Affrique a délivré à la société HJC, le 11 juin 2015, un permis de construire valant exploitation commerciale (« PCAEC ») pour l’extension d’un supermarché exploité par la société SOTOURDI.

Ce PCAEC est intervenu alors même que des concurrents, dont la société DISTAFF ainsi que le Préfet, avait saisi la CNAC de recours les 4,5 et 11 juin 2015, contre un avis favorable rendu par la CDAC le 13 mai 2015.

Le 10 septembre 2015, la CNAC a émis un avis défavorable au projet.

Le maire de la Commune de Saint-Affrique a ensuite retiré son arrêté de PCAEC le 6 janvier 2016.

Dans ces conditions, la société DISTAFF a déposé une requête devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux, aux fins de condamnation de la Commune au versement d’une indemnité de 11 736 000 euros pour les préjudices qu’elle estimait avoir subi du fait de l’illégalité du permis, de la tardiveté de son retrait par la Commune ainsi que de l’absence d’opposition par cette dernière à une déclaration de vente au déballage de la société SOTOURDI pour la période du 13 avril au 13 juin 2015.

Dans un arrêt en date du 17 février 2020, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé que le permis n’était pas illégal du seul fait d’avoir été délivré dans le délai de recours d’un mois devant la CNAC. Elle a toutefois jugé que le PCAEC était illégal en raison de l’avis défavorable de la CNAC du 10 septembre 2015 (CAA Bordeaux, 17 février 2020, 18BX00281).

La société DISTAFF a formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat contre l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux du 17 février 2020. 

La question qui se posait devant la Haute Juridiction était de savoir si la délivrance du PCAEC avant l’extinction du délai de recours devant la CNAC et alors qu’un recours avait été formé, rendait le permis illégal.

Le Conseil d’Etat a rejeté le pourvoi de la société DISTAFF, mais est revenu sur le principe retenu par la Cour, par substitution de motif :

« en cas de recours introduit devant la Commission nationale d’aménagement commercial contre l’avis de la commission départementale compétente, ou en cas d’auto-saisine de la commission nationale, l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire valant autorisation d’exploitation (…) doit attendre l’intervention de l’avis, exprès ou tacite, de la commission nationale pour délivrer le permis ».

Le Conseil d’Etat a considéré que dans la mesure où l’avis de la CNAC se substitue à celui de la CDAC, la délivrance du PCAEC ne pouvait légalement intervenir avant que le CNAC ne rende son avis.

Il ressort de cette décision que la Haute Juridiction distingue les permis délivrés avant l’enregistrement d’un recours en contestation de l’avis de la CDAC devant la CNAC, de ceux délivrés après l’enregistrement d’un tel recours.

  • Les permis délivrés avant l’enregistrement d’un recours devant la CNAC restent légaux, mais seraient toujours susceptibles de devoir être retirés en cas d’avis défavorable de la CNAC.
  • En revanche, les permis délivrés après l’enregistrement d’un recours devant la CNAC sont illégaux. Ils doivent, dans tous les cas, être retirés en cas d’avis défavorable de la CNAC ou régularisés en cas d’avis favorable de cette dernière.

Tirant les conséquences de l’illégalité du PCAEC, le Conseil d’Etat affirme que cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la Commune et à ouvrir droit à la réparation des préjudices de toute nature ayant pu en résulter directement. La Haute juridiction précise tout de même que la tardiveté du retrait du permis illégal par le maire est seulement susceptible d’être prise en compte dans l’évaluation du préjudice invoqué.

Le Conseil d’Etat a toutefois estimé en l’espèce qu’il n’y avait pas de lien direct et certain entre les préjudices invoqués et l’illégalité du PCAEC.

CDM

Rappel sur la notion de « projet » au sens des dispositions de l’article L.122-1 du Code de l’environnement à la suite de l’arrêt du Conseil d’Etat du 1er février 2021, n° 479730

  • La notion de « projet » dans le Code de l’environnement

La notion de « projet » est la notion centrale de l’approche de l’évaluation environnementale.

Cette notion, d’emploi courant, est polysémique, supposant de ne pas confondre son acceptation en droit de l’environnement avec celle retenue dans d’autres régimes juridiques (droit de l’urbanisme, droit fiscal…).

Il convient donc de s’attacher à la définition qui en est donnée par le Code de l’environnement, au regard de la finalité du contrôle de l’AE, à savoir l’impact du projet sur l’environnement.

Dans sa version la plus récente[1], l’article L 122-1 du Code de l’environnement dispose :

« I.-Pour l’application de la présente section, on entend par :

1° Projet : la réalisation de travaux de construction, d’installations ou d’ouvrages, ou d’autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris celles destinées à l’exploitation des ressources du sol ;

2° Maître d’ouvrage : l’auteur d’une demande d’autorisation concernant un projet privé ou l’autorité publique qui prend l’initiative d’un projet ;

3° Autorisation : la décision de l’autorité ou des autorités compétentes qui ouvre le droit au maître d’ouvrage de réaliser le projet ;

4° L’autorité compétente : la ou les autorités compétentes pour délivrer l’autorisation du projet.

II.-Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine font l’objet d’une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d’entre eux, après un examen au cas par cas. […]

III.- L’évaluation environnementale est un processus constitué de l’élaboration, par le maître d’ouvrage, d’un rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement, dénommé ci-après ” étude d’impact “, de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l’examen, par l’autorité compétente pour autoriser le projet, de l’ensemble des informations présentées dans l’étude d’impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d’ouvrage. […]

Lorsqu’un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l’espace et en cas de multiplicité de maîtres d’ouvrage, afin que ses incidences sur l’environnement soient évaluées dans leur globalité. […] ».

En d’autres termes, il y a lieu de procéder à une évaluation globale, mais à l’échelle du « projet » pertinent, en vérifiant bien entendu que, soit par sous-évaluation du périmètre pertinent, soit par « fractionnement » temporel ou spatial du projet, certaines incidences du projet sur l’environnement ne soient ignorées.

Si chaque projet doit être appréhendé dans son ensemble, pour autant, chaque projet présente des caractéristiques et un périmètre qui sont tributaires de sa cohérence propre et de son degré de maturité.

Le droit français procède en l’état de la Directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 qui retient qu’un projet est « une réalisation, une installation, un ouvrage ou une intervention ».

Notre droit a intégré l’évaluation environnementale par symétrie avec l’exigence identique pesant sur les « plans et programmes » par la Directive 2001/42/CE du 27 juin 2001.

L’objectif de la Directive « Projets » de 2011, qui est que les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de  leur  nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une évaluation en ce  qui concerne leur incidence, ne saurait être détourné par le fractionnement d’un projet, l’absence de prise en considération de l’effet cumulatif de plusieurs projets, ne devant pas  avoir pour résultat pratique de les soustraire dans leur totalité à l’obligation d’évaluation alors  que, pris ensemble, ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement[2].

La validation du périmètre « pertinent » au regard de ces textes est difficile et sensible tant pour le pétitionnaire que pour l’organe assurant la fonction d’autorité environnementale (MRAE, DRIEE, CGEDD).

La rédaction actuelle de l’article L 122-1 qui vise le « projet » est issue d’une ordonnance du 3 août 2016 qui a remplacé l’obligation d’évaluer globalement les incidences « des projets concourant à la réalisation d’un même programme de travaux, d’aménagement ou d’ouvrages », qui entendait poursuivre le même objectif, mais dont la portée se trouvait réduite par la définition du programme comme constituant une unité fonctionnelle.

  • La position de l’autorité environnementale et de la jurisprudence sur la notion de « projet »

Au regard de ce qui précède, l’autorité environnementale a adopté une conception large de la notion de « projet », dont elle tente de déterminer les contours dans différents guides et avis[3].

Les guides et avis sont très utiles pour l’administration elle-même, les maîtres d’ouvrages, les bureaux d’études et les praticiens.

Pour autant, ils ne sont pas source de droit et ne peuvent avoir qu’une fonction interprétative.

Ce sont soit des précisions du législateur soit la jurisprudence qui peuvent fixer l’application de cette notion juridique.

Une application extensive de celle-ci serait tout autant irrégulière qu’une application restrictive.

La jurisprudence est ainsi venue apporter des précisions pour définir le « projet » qui sera soumis à l’examen ou non de l’autorité environnementale.

Par un arrêt du 28 novembre 2018, le Conseil d’Etat a rappelé qu’une programmation globale (par exemple dans un document d’urbanisme) ne remettait pas en cause l’existence de projets opérationnels distincts qui doivent être analysés à leur échelle propre (Conseil d’Etat 28 novembre 2018, n°419315).

Dans ses conclusions sous cet arrêt, le rapporteur public avait rappelé sans ambiguïté :

« Vous l’aurez compris, il demeure, tout de même, que la notion de projet présente un caractère un peu irréductible à la caractérisation par des critères stricts – ce qui est source d’une insécurité juridique qu’il ne faut pas sous-estimer. Afin de s’efforcer de la réduire, le commissariat général au développement durable a publié un « guide d’interprétation de la réforme » dont l’on peut tirer qu’un projet doit être regardé comme une même réalisation, incluant l’ensemble des travaux, installations, ouvrages ou autres interventions qui lui sont nécessaires, c’est-à-dire qui, sans le projet, ne seraient pas réalisés ou ne pourraient remplir le rôle pour lequel ils sont réalisés. Ce guide indique par ailleurs que, pour déterminer l’étendue d’un projet et les éléments qui le composent, le ou les maîtres d’ouvrages peuvent recourir à différents indices, notamment la proximité géographique et temporelle de ces composantes, leurs similitudes et leurs interactions, ainsi que l’objet et la nature des opérations.  

La présente affaire vous donnera l’occasion de préciser, au moins sur un point, les éléments susceptibles – ou non – de caractériser l’existence d’un unique projet, votre jurisprudence étant encore vierge d’exemples d’application des dispositions issues de l’ordonnance de 2016 ». 

Il a été retenu que le juge des référés avait été trop loin en élargissant excessivement l’échelle à laquelle l’analyse de l’autorité environnementale devait être réalisée, faisant prévaloir les dimensions de la zone délimitée par le PLU applicable sur celles du terrain affecté à la création d’un lotissement.

Cette décision rappelle que ce que proscrit la CJUE est le fractionnement artificiel de projets « unicitaires », c’est-à-dire concourant, le cas échéant par des moyens et maîtres d’ouvrages distincts, à la réalisation d’un ouvrage, d’une installation, d’une construction ou d’un aménagement.

Un raisonnement identique a encore été retenu dans une affaire dont l’objet était plus large, attaché à la qualification d’un « appel à projet » pour l’éolien marin au regard des exigences de concertation avec le public et d’évaluation environnementale (Conseil d’Etat, 7 juin 2019, 414426).

A cette occasion, le Conseil d’Etat a souligné que la société lauréate de cet appel à projet était autorisée à exploiter un « poste électrique sur le domaine public maritime au large de Saint-Nazaire, sans la dispenser d’obtenir les autorisations requises par d’autres législations avant la réalisation des travaux et la mise en service de ces installations ».

L’appel à projet n’était ni un « Plan ou Programme » ni un « Projet » au sens des Directives.

C’est important, car c’est une reconnaissance non seulement du phasage des projets et de la pluralité des autorisations à obtenir, mais surtout que le droit communautaire est respecté, dès lors que les autorisations à obtenir seront elles-mêmes précédées d’une autorisation environnementale.

Enfin, très récemment, dans un arrêt du 1er février 2021, le Conseil d’Etat a retenu (par une solution moins extensive que ce que préconise l’autorité environnementale) que la similitude de deux opérations de construction, prévues sur deux parcelles adjacentes reliées par deux passages, et s’inscrivant dans le projet d’urbanisation de la zone, ne suffisait pas à caractériser l’existence d’un projet unique qui serait fractionné et aurait dû, dans son ensemble, être soumis à une étude d’impact (Conseil d’Etat, 1er février 2021, n° 429790 : JurisData n° 2021-001326).

Selon le Conseil d’Etat, des liens entre les deux opérations, de nature à caractériser le fractionnement d’un projet unique, n’étaient pas identifiables.

  • Les apports de l’arrêt du Conseil d’Etat du 1er février 2021, n° 429790  

Selon la haute juridiction, il ne convient pas de rechercher si des indices permettent de déceler une unicité de projet, mais à l’inverse, il convient de rechercher si un projet unique a été artificiellement fractionné.

Là encore, dans ses conclusions sous cet arrêt, le Rapporteur public avait souligné l’importance d’éviter tout amalgame en relevant :

« Le fait que le PLU ait envisagé un certain zonage pour certains types  d’aménagements peut le cas échéant être appréhendé dans le cadre de l’évaluation  environnementale des plans et programmes prévue par la directive 2001/42/CE. Mais il ne peut pas être un indice de ce que plusieurs projets réalisés ou réalisables dans le cadre de cette planification d’urbanisme constitueraient en réalité un seul projet fractionné au sens du III de  l’article L. 122-1 ».

Une telle décision apparaît conforme aux ambitions de la directive, de la jurisprudence communautaire, et de l’article L. 122-1 du Code de l’environnement qui entendent éviter que l’obligation de réaliser une évaluation environnementale ne soit contournée par le fractionnement artificiel des projets, mais sans astreindre les autorisation d’urbanisme à gérer des aspects  qui leur sont étrangers.

Au surplus, il peut être relevé que dans sa décision, le Conseil d’État a mis en évidence le fait que le second projet n’était encore qu’hypothétique puisqu’il n’avait pas fait l’objet d’une demande d’autorisation à ce stade… Cet arrêt du 1er février 2021 rappelle que ce n’est pas parce que des projets présentent certains liens entre eux, qu’ils constituent nécessairement deux composantes d’un même « projet » au sens du Code de l’environnement, sauf à démontrer qu’il aurait été irrégulièrement fractionné.

AHC


[1] Loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat

[2][2] Cf. CJCE, 21 septembre 1999, Commission c/ Irlande, aff. C-392/96 ; CJCE, 25 juillet 2008, Ecologistas en Acción-CODA, aff. C-142/07 ; CJCE, 28 février 2009, Paul Abraham e.  a., aff. C-2/07 ; CJCE, 10 décembre 2009, Umweltanwalt von Kärnten, aff. C-205/08 ; CJUE, 7 mars 2014, Ayuntamiento de Benferri, aff. C-300/13.

[3] Guide de lecture de la nomenclature des études d’impacts – publication févr. 2017. – Guide d’interprétation de la réforme – publication août 2017 mis à jour en 2019. – Note de l’Autorité environnementale relative aux ZAC et autres projets d’aménagement urbains – Note délibérée n° Ae 2019 N 07 adoptée lors de la séance du 5 févr. 2020

EXPROPRIATION – Rappel sur la date de prise de possession en cas de consignation de l’indemnité d’expropriation

En cas de consignation de l’indemnité d’expropriation, le délai d’un mois prévu par l’article L. 231-1 du Code de l’expropriation part à compter de la réception de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception (LRAR) notifiant à l’exproprié la consignation par l’expropriant.

La jurisprudence retient que la consignation est régulière même si sa notification n’est pas parvenue à l’exproprié, dès lors que ce dernier n’a pas réclamé la lettre recommandée avec avis de réception qui lui a été adressée à cet effet (CA Bourges, expr., 1er août 1996 :  JurisData n° 1996-045811 « pli avisé et non réclamé »). 

Dans ce cas, il convient de retenir que la notification est intervenue à la date de la première présentation de la lettre au domicile de l’exproprié*.

La date de prise de possession est ensuite celle du jour qui suit l’achèvement du délai d’un mois à compter de cette date.

Si le délai obtenu après calcul se termine un samedi, un dimanche ou un jour férié, le délai est prolongé jusqu’au 1er jour ouvrable suivant.

* Dans l’hypothèse d’un retour de la LRAR (pli avisé et non réclamé), nous recommandons néanmoins par prudence de faire délivrer la notification par huissier de justice.

Relèvement temporaire du seuil de dispense de procédure pour les marchés publics de travaux et de fourniture de denrées alimentaires

Le décret n° 2020-893 du 22 juillet 2020, paru au journal officiel du 23 juillet 2020, relève temporairement le seuil de dispense de procédure pour les marchés publics de travaux et de fourniture de denrées alimentaires.

Il a pour objet de faciliter temporairement la conclusion de marchés publics dans deux secteurs économiques particulièrement impactés par la crise sanitaire :

  • D’une part, il relève à 70 000 euros hors taxes le seuil de dispense de procédure pour la passation des marchés publics de travaux conclus avant le 10 juillet 2021.

Aux termes de l’article 1er, les acheteurs sont néanmoins invités “à faire une bonne utilisation des deniers publics en choisissant une offre pertinente, et en ne contractant pas systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin“.

Les dispositions sont applicables aux lots qui portent sur des travaux et dont le montant n’excède pas 70.000 euros hors taxes. Le montant cumulé de ces lots ne doit pas dépasser 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

  • D’autre part, il autorise, pour les produits livrés avant le 10 décembre 2020, la conclusion de contrats sans publicité ni mise en concurrence lorsque le marché répond à un besoin inférieur à 100 000 euros hors taxes et porte sur la fourniture de denrées alimentaires produites, transformées et stockées avant la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire le 10 juillet 2020, dont la vente a été perturbée par la crise sanitaire.

De même que précédemment, il est précisé à l’article 2 que « Les acheteurs veillent à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin ».

Ces dispositions sont applicables aux lots dont le montant est inférieur à 80 000 euros hors taxes, à condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Ces mesures visent à permettre de contracter directement et rapidement avec des entreprises pour accélérer la reprise économique dans le secteur du BTP et lutter contre le gaspillage alimentaire en soutenant les producteurs agricoles.

AHC

Précisions sur le sursis à statuer

Intéressant arrêt du Conseil d’Etat (d’ailleurs fiché en A) rendu sur une question de sursis à statuer motivé par l’élaboration d’un document d’urbanisme en cours. La haute juridiction administrative rappelle qu’un tel sursis doit non seulement être suffisamment motivé mais également qu’il doit être opposé “en vertu d’orientations ou de règles que le futur plan local d’urbanisme pourrait légalement prévoir”, invitant ainsi le juge administratif à effectuer, au passage, et en quelque sorte un “pré-contrôle” du PLU en devenir. CE, 22 juillet 2020, req. n°427163 #droitdelurbanisme

Réforme de l’autorité environnementale – Parution du décret n° 2020-844 du 3 juillet 2020

Le décret n° 2020-844 du 3 juillet 2020 relatif à l’autorité environnementale et à l’autorité chargée de l’examen au cas par cas, publié au Journal officiel du 4 juillet 2020, réforme l’autorité environnementale et l’autorité chargée de mener l’examen au cas par cas pour les projets relevant du champ de l’évaluation environnementale.

Ce décret confie notamment au préfet de région la compétence pour mener l’examen au cas par cas des projets locaux, et aux MRAe la compétence d’autorité environnementale sur ces mêmes projets.

On notera particulièrement la création de deux nouveaux articles R.122-24-1 et R.122-24-2 dans le Code de l’environnement, destinés à prévenir les situations de conflits d’intérêts, pour les avis comme pour les décisions au cas par cas dans lesquelles les autorités pourraient être amenées à se trouver.  

Les nouvelles dispositions s’appliquent aux demandes d’avis ou d’examen au cas par cas déposées à compter du 5 juillet 2020.